Dans DOSSIERS, Environnement

De nouveaux exemples de bio-inspiration/biomimétisme
dans la suite du précédent article

Pour les systèmes d’organisation

Des fourmis et bancs de poissons pour surpasser nos GPS

Mieux gérer le trafic routier, diminuer les embouteillages et les accidents, et pourquoi pas faire tout ça en se passant de GPS en plus ? Le rêve n’est plus très loin de la réalité…

Pourquoi est-ce bio-inspiré ?

Les bancs de poissons se déplacent extrêmement vite, sans jamais de collision. Les fourmis, malgré leur cerveau de la taille d’une tête d’épingle, ont développé d’étonnantes facultés (pas encore totalement comprises) pour se repérer et s’orienter, même en marchant à reculons. Les scientifiques essayent d’ailleurs de les décrypter sous la forme d’un « algorithme des fourmis » pour étudier la science de la circulation, leur comportement de recherche d’itinéraire entre la colonie et une source de nourriture, ce qui a déjà été utilisé pour la mise au point des systèmes de guidage GPS. Mais on peut aller encore plus loin. Les abeilles par exemple ont la capacité de cesser d’exploiter une ressource dès qu’elle n’apparaît plus comme suffisante, même si celle-ci n’est pas épuisée.

En matière de biomimétique, les idées fourmillent. En voilà une qui tient vraiment la route :

Les chercheurs du CNRS et d’Aix-Marseille Université ont mis au point un robot à six pattes capable de se repérer sans GPS ni cartographie. Son petit nom : AntBot (aka “Robot-Fourmi”). Il part en vadrouille, explore aléatoirement son territoire, puis rentre au bercail tout seul comme un grand, grâce à une sorte de “boussole solaire”. Son fonctionnement, relativement “low tech” et peu coûteux, s’inspire des fourmis du désert, qui captent les UV du soleil et savent interpréter leur polarisation pour se repérer dans le Sahara. Après avoir parcouru des centaines de mètres pour trouver leur pitance, ces fourmis rentrent sans souci au nid, en ligne droite, sans jamais se perdre. De véritables stars de la navigation, qu’il était temps de suivre à la trace.

Le blob, nouvel urbaniste ?

En 2010, des chercheurs anglais ont réalisé des études sur le Physarum polycephalum, une variété d’amibe qui s’apparente aux champignons sans pour autant en être un. On le surnomme d’ailleurs « blob », en référence au film de science-fiction The Blob de 1958. Ils ont disposé sur des cartes de différents pays des morceaux de nourriture aux emplacements des grandes villes et ont pu observer le réseau de veines du « blob » se déplacer « de ville en ville », privilégiant certains trajets plutôt que d’autres pour être le plus efficace possible. En optimisant le transfert des nutriments entre les parties éloignées de son corps, le Physarum polycephalum retrace ainsi un parcours « optimal ». Une source d’inspiration étonnante mais qui permet d’imaginer comment nous pourrions optimiser des réseaux de transports entre ces différentes zones urbaines par exemple.

Exemple en vidéo avec une carte du réseau japonais de transport (lire la vidéo à 15mn 30s), c’est édifiant !

Pour la santé

Du requin au revêtement antibactérien

La société américaine Sharklet a fabriqué un revêtement antibactérien destiné à être utilisé dans les hôpitaux par exemple. Cette technologie pourrait permettre de diminuer fortement, voire d’abandonner totalement, l’usage de produits antibactériens pour nettoyer les surfaces. Elle peut aussi contribuer à diminuer grandement les risques de contracter des maladies nosocomiales lors de séjours hospitaliers.

Pourquoi est-ce bio-inspiré ?

Parce que ladite société s’est, une fois de plus, directement inspirée de la peau des requins.

Le requin des Galapagos ne présente en effet pas une seule bactérie sur la surface de son corps et ne souffre d’aucune infestation d’organismes quelconques. Il ne doit pas cette particularité à sa grande vitesse (à l’inverse, le requin des Galapagos a plutôt tendance à se déplacer lentement), mais au fait de posséder des denticules sur ses écailles, qui forment des motifs bien particuliers empêchant les bactéries de se poser et d’adhérer à sa peau.

Les combinaisons de natation s’inspirent elles aussi des peaux de requins, en imitant ses vertus hydrophobes. George Lauder de l’Université de Harvard, a découvert que si les requins glissent si bien, c’est parce que leurs écailles exercent une forte poussée sur l’eau. Une caractéristique essentielle pour les nageurs.

Des poissons polaires pour protéger les cellules et plaquettes sanguines

La médecine régénérative fait face à moult obstacles, dont celui de la conservation et de la préservation des matériaux biologiques (cellules et plaquettes sanguines), généralement plongés dans l’azote liquide avec un risque de détérioration. La solution ? Un antigel !

Pourquoi est-ce bio-inspiré ?

Parce que cet antigel nous vient directement d’un poisson, d’un de ceux qui vivent dans ces milieux peu accueillants…

En s’adaptant aux conditions de vie des pôles, les espèces vivantes ont développé tout un arsenal de réponses morphologiques, physiologiques et comportementales qui inspirent aujourd’hui le biomimétisme. Ces différentes espèces sont confrontées à de très basses températures, à la présence de glaces terrestres et de mer, à l’alternance de jour et de nuit, et à de faibles taux d’humidité. Les poissons des mers polaires, les notothénioïdes, sont des animaux ectothermes, ce qui signifie que leur température intérieure est la même que celle de l’eau, soit 0° ou parfois -1° à cause du sel présent dans l’eau. Pourtant, aucun cristal de glace ne se forme dans leurs corps à cette température. C’est une enzyme présente dans leur sang et sécrétée par le pancréas qui empêche le cristal en formation d’agréger des molécules d’eau. L’architecture chimique remarquable de cette protéine antigel ouvre la voie à des études en médecine régénérative pour la conservation et la préservation des matériaux biologiques, mais aussi en agriculture pour les graines et semences présentes dans des sols gelés etc…

Les exemples de molécules extraites du vivant et utilisées comme anti-cancéreux, antibiotiques, antiviraux, anti-champignons… abondent… Pour le milieu marin, les éponges produisent à elles seules plus de 30% de ces produits. On estime à quelque 25 000 le nombre de produits d’intérêt pharmacologique ou cosmétique déjà obtenus de modèles océaniques. Pas moins de treize prix Nobel de médecine ont été acquis à partir de modèles aquatiques.

Pour la défense

Un papillon de nuit pour détecter les explosifs

La détection efficace d’explosifs tels que le trinitrotoluène (TNT) constitue un défi en matière de sécurité. Car ces composés, très peu volatils, ne peuvent être détectés à distance qu’avec des capteurs extrêmement sensibles. Les systèmes actuels détectent des concentrations de l’ordre de 1 partie par milliard (soit une molécule pour 109 molécules d’air), performance qui peut se révéler insuffisante pour assurer la sécurité d’un aéroport, par exemple. Un détecteur d’explosifs repoussant d’un facteur mille les seuils de détection atteints jusque-là, allant jusqu’à s’approcher de ceux d’un chien entraîné, a été mis au point.

Pourquoi est-ce bio-inspiré ?

Des chercheurs du CNRS se sont inspirés du Bombyx du Mûrier, un papillon de nuit originaire de Chine et dont la chenille est communément appelée ver à soie. Ils ont copié la structure de ses antennes pour créer un micro-levier en silicium où s’alignent près de 500.000 nanotubes en dioxyde de titane, capable de détecter des concentrations de TNT jusqu’à 1.000 fois inférieures aux quantités que la technologie actuelle est en mesure de repérer.

Le CNRS précise que cette même technologie pourrait être utilisée pour détecter les drogues ou les substances toxiques comme les COV. Quel flair !

Les exemples de molécules extraites du vivant et utilisées comme anti-cancéreux, antibiotiques, antiviraux, anti-champignons… abondent… Pour le milieu marin, les éponges produisent à elles seules plus de 30% de ces produits. On estime à quelque 25 000 le nombre de produits d’intérêt pharmacologique ou cosmétique déjà obtenus de modèles océaniques. Pas moins de treize prix Nobel de médecine ont été acquis à partir de modèles aquatiques.

Des caméléons et céphalopodes pour changer un objet de couleur et de texture instantanément

Pourquoi est-ce bio-inspiré ?

Pour ce faire, ces équipes ont analysé caméléons et céphalopodes (pieuvres, seiches, calamars) qui disposent d’une capacité exceptionnelle : l’homochromie variable. Ceci leur donne la faculté de changer de forme et de couleur en fonction de leur environnement, et même d’exprimer des sentiments. Tout ça de manière quasi instantanée. En quelques millisecondes ils sont ainsi capables de modifier la texture de leur peau et d’imiter la granularité de leur environnement. Il faut le voir pour le croire, c’est parfois stupéfiant.

En s’inspirant de l’animal au célèbre camouflage, le caméléon, les chercheurs de l’industriel de l’armement Nexter développent une peau hautement technique capable de reproduire les couleurs et textures environnantes, en temps réel, pour échapper à l’œil des technologies de plus en plus invasives. Ce projet à la pointe des technologies de furtivité dont le principe de « peau active », composée de macro-pixels qui changent automatiquement de couleur en fonction de leur environnement, a été breveté par la DGA.

Regardez plutôt ce que ça donne en vidéo (et attendez quelques secondes pour les changements) :

Marie B.

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